En mai 2010, un projet qui allait porter le nom générique d’Habiter Genappe germait au sein des équipes des Centres culturels de Genappe et du Brabant wallon et du CEC Les Ateliers du Léz’Arts. Un an et demi plus tard, une publication voyait le jour et retraçait le chemin parcouru entre le germe de l’idée première et ses nombreuses réalisations : des photos, des témoignages, des rencontres, des récits de vie, des expressions et des sensibilités multiples. Le chemin ne fut pas toujours tracé en ligne droite mais, comme dans les paysages de Genappe, il a souvent débouché sur des horizons larges et prometteurs…
Comme point de départ du projet, cette question apparemment simple : « Qu’est-ce que cela représente pour vous d’habiter ici ? ». Habiter, cela nous concerne à priori tous. Comme respirer, se nourrir ou rêver, habiter est une fonction vitale pour l’individu. Personne ne peut avancer qu’il manque de compétence, d’expertise ou de savoir-faire pour s’approprier ce sujet. Passé cette généralité, on s’aperçoit que la notion d’habiter englobe de multiples réalités et ressentis. Habiter un endroit, dans une ville ou un village, c’est avoir un lien avec ce territoire, ses chemins, ses rues, ses paysages, ses infrastructures… C’est entretenir (ou non) des relations avec ses voisins. C’est également se définir une identité (« Je suis genappien depuis toujours », « Je suis une pièce rapportée, même si je me sens de Glabais », « Je ne suis pas d’ici »). Cela parle de l’histoire personnelle de chacun, des trajectoires
de vie. Mais habiter, cela fait aussi référence à notre relation à l’intime, à nos espaces privés que l’on décore et qui nous ressemblent tant (ou pas du tout…). Enfin, cette thématique a un aspect plus collectif, ‑sociologique, dans le sens où elle concerne aussi la structure et le fonctionnement de la société et où elle questionne le vivre- (tous-) ensemble. Dans une Province où il fait bon vivre mais où l’accès à la propriété (et parfois au logement tout
simplement) pose problème à certains – les jeunes ménages, les personnes isolées ou « moins favorisées », les familles monoparentales… – il nous a semblé que prendre le temps d’explorer cette thématique promettait de riches découvertes. Et nous ne fûmes pas déçus…
En tant qu’opérateurs culturels, nous avons utilisé les moyens qui nous sont familiers. Concrètement, à travers ce projet, c’est l’expression des habitants de Genappe que nous voulions susciter. A notre manière, c’est-à-dire en
donnant la parole, en posant des questions, en suscitant des réflexions, en utilisant des appareils photo ou d’autres canaux artistiques. Nous nous sommes rapidement rendu compte que les points de vue étaient multiples et parfois contrastés. Alors que certains parlaient du plaisir de vivre depuis longtemps à un endroit devenu familier, d’autres s’exprimaient sur l’incertitude de l’avenir et sur le droit au logement. Et tous ces points de vue, en s’exprimant, prenaient une existence que nous ne pouvions plus ignorer. Comment porter toutes ces paroles dans l’espace public ? Et comment, également, créer des rencontres entre tous ces points de vue, malgré de parfois très nettes divergences ? Comment précisément transformer les divergences en points de contact ? Des artistes ont accompagné le processus afin de permettre aux participants de donner une forme visible et durable à ce qu’ils avaient à nous dire. En mettant à disposition leurs compétences techniques et professionnelles, ils ont emmené les participants dans des démarches créatrices et porteuses de sens. Les artistes ont également œuvré à ce que ce projet ne soit pas que celui des « cultureux », pour qu’il devienne aussi celui des habitants…